Mohamed Ezzouak, fondateur du portail internet et communautaire Yabiladi.com, s'exprime sur le marketing ethnique ou comment réussir dans le business à la condition de maîtriser toutes les données concernant la population cible.La Nouvelle Tribune : Le marketing ethnique est-il développé en Europe?
Mohamed Ezzouak : En Europe, le niveau de développement de cette approche affinitaire est différent pour chaque pays. Les entreprises du Royaume-Uni, par exemple, ont très tôt adopté ce type de marketing et de communication. Il faut préciser que leur système social dit communautaire se prête très bien à la personnalisation du message commercial.
L'Espagne a également très vite développé le marketing ethnique à destination des populations immigrées d'Amérique Latine qui sont à la fois très proche au travers de la langue, de l’histoire commune, mais qui demeurent différentes dans les habitudes de consommation ou encore dans la culture. De cette expérience avec les « latinos » les opérateurs économiques espagnols, avec pragmatisme et opportunisme commerciaux, ont lancé une offensive sur la communauté marocaine en Espagne.
La France s'y met également bien que la culture et le système social du pays représentent un frein à cette approche. Les entreprises françaises vont sur ces marchés communautaires avec hésitation de peur de froisser leur image auprès du grand public. Souvent, donc, elles développent des marques nouvelles dédiées ou évitent de lancer une communication grand public sur leur offre ethnique.
Mais certains secteurs comme l'agroalimentaire, la cosmétique où le transfert d'argent n'ont plus ce complexe de l'image.
Les entreprises marocaines cherchent également à toucher une partie de cette cible à savoir les Marocains installés en France, en Espagne, en Belgique, .... Doivent-elle également développer une démarche communautaire ?
Pour le Maroc, le marketing et la communication à destination de la communauté marocaine résidente à l'étranger doivent être adaptés à leurs particularités et à leurs attentes. On croît trop souvent -à tort- que les Marocains à l'étranger perçoivent un message comme un Marocain du Maroc. On oublie que ce Marocain vivant à l'étranger est influencé par son environnement direct (du pays d'accueil), que dans cette communauté il y a plusieurs communautés en fonction des pays de résidence, de la génération, ... De ce fait, les opérateurs économiques marocains se doivent de mieux connaître leurs cibles et d'adapter leur message.
Comment se caractérise cette nouvelle stratégie?
Lorsqu'on est en charge du marketing ou de la communication commerciale, la première brique de la stratégie est de se procurer d'informations chiffrées sur la population cible et sur ses habitudes de consommation. Aujourd'hui, très peu d'entreprises ont développé une démarche et une méthodologie efficiente pour sonder et recueillir ce genre de données statistiques. Il est aberrant de généraliser à toute la communauté marocaine à l'étranger les résultats de sondages réalisés pendant l'été au port de Tanger.
C'est cette connaissance de la communauté qui permet, par exemple, de recommander aux entreprises marocaines de désaisonnaliser leurs campagnes de communication, innover au niveau des supports choisis, affiner le casting pour les spots télévisés, développer une démarche de proximité, ...
Cette approche "communautaire" est-elle adaptée au monde d'aujourd'hui?
Aujourd'hui plus qu'hier. La mondialisation d'un côté et les mouvements migratoires de plus en plus importants de l'autre, sont les catalyseurs du besoin de marketing affinitaire.
Les entreprises sont de plus en plus ouvertes sur le monde. Elles ont compris les enseignements de l'erreur de firmes qui ont développé des produits uniques pour le monde entier. A l'heure du village global, elles sont clairement engagées à adapter leurs produits, leurs démarches commerciales et leur communication.
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